Le 29 janvier 2015, le premier ministre français s'exprime lors de sa visite de la chaîne d'assemblage de l'A320 à Tianjin. (PHOTO: YUJIE)
YAN JUFEN*
Pendant les festivités du cinquantenaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la Chine et la France, de nombreuses visites ont été échangées entre les dirigeants et les hauts fonctionnaires des deux pays ; des mesures ont été adoptées qui promeuvent la coopération dans différents domaines, comme l'économie et le commerce, les sciences et technologies, la culture et le tourisme, mesures grâce auxquelles les échanges entre personnes des deux pays ont connu un dynamisme sans précédent. Selon l'ambassade de Chine en France, les deux pays ont organisé près de mille événements en célébration du 50e anniversaire des relations diplomatiques bilatérales, la plupart d'entre eux non gouvernementaux, ce qui marque un enracinement des relations sino-françaises dans l'opinion publique. Les liens entre les peuples des deux pays se sont construits d'abord sur des relations économiques.
Percée de l'investissement chinois en France
Les statistiques montrent un fort développement des relations économiques et commerciales entre la Chine et la France en 2014. Les exportations chinoises vers la France ont atteint 28,7 milliards de dollars, soit une hausse de 6 % par rapport à 2013, tandis que les importations de produits et services de l'Hexagone se montaient à 27,0 milliards de dollars, en augmentation de 17 %. Les chiffres d'EUROSTAT révèlent d'autre part que, si la croissance des exportations totales de la France s'élevait à 2,3 % sur les trois premiers trimestres de l'année 2014, celles vers la Chine ont augmenté de 4,6 % sur la même période. De même, les importations françaises de produits chinois ont crû plus rapidement que celles en provenance du reste du monde.
2014 a été une année exceptionnelle pour l'investissement chinois en France : 13 acquisitions d'entreprises françaises pour une valeur de plus de 4 milliards de dollars, un record sur ces dix dernières années. Fosun a offert 1,3 milliard de dollars au groupe français de tourisme et de vacances Club Med, un montant record concernant l'acquisition d'actifs français par une entreprise chinoise. Autres fusions remarquables en 2014 : le consortium Symbiose, constitué de la société publique chinoise Shandong Hi-Speed Group et de la société hongkongaise d'investissement Friedmann Pacific Asset Management, a acquis 49,9 % des parts de l'aéroport de Toulouse, le quatrième de France ; le constructeur chinois Dongfeng a injecté 800 millions d'euros dans le captial de PSA Peugeot Citroën en échange d'une participation de 14 % au capital du groupe ; Huazhu Hotels Group classé 13e dans l'hôtellerie mondiale et le groupe français Accor ont annoncé un partenariat stratégique sur le long terme avec échange de participations.
Les investissements chinois en France connaissent une croissance rapide depuis 2011. Désormais on observe leur diversification. Si en 2011 les entreprises chinoises ont investi dans 23 nouveaux projets en France, on en a compté 31 en 2012 et en 2013 ; ce sont 33 entreprises chinoises qui ont pris pied dans l'Hexagone. Selon les statistiques de Business France, en 2014, la France comptait 250 entreprises chinoises (contre 229 en 2013), un vivier de 13 000 emplois. Les investissements chinois portent sur divers secteurs, depuis les appareils électriques jusqu'à l'industrie textile, en passant par l'électronique, l'informatique, le parfum, les produits cosmétiques, l'automobile, les meubles et les articles ménagers, la construction navale, les chemins de fer, l'aviation, les produits minéraux, le verre, le papier, le bois, les produits chimiques, les plastiques, l'hôtellerie, le tourisme, la restauration, l'équipement médical, les médicaments et les produits biologiques, l'agriculture, etc.
L'investissement chinois prend plusieurs formes en France. Des filiales à 100 % ou des bureaux de représentation, comme la Banque de Chine qui a créé sa succursale française. Reprise à 100 % d'une entreprise française, comme l'exemple de la société chinoise Furui qui a racheté Echosens. Reprise à 100 % d'une entreprise pour en changer la marque, comme Datascope racheté puis renommé Mindray (du nom de l'entreprise mère Mindray de Shenzhen). Dans d'autres cas, il y a prise de participation au capital d'une entreprise française, comme par exemple Northern Heavy Industries Group, qui a racheté 70 % de Neyrpic Framatome Mecanique, la société allemande Kleuters empochant les 30 % restants. Enfin, certaines sociétés optent pour une joint venture, comme la China National Nuclear Corporation et la société française EDF qui construisent en commun des centrales nucléaires au Royaume-Uni.
Le 19 février 2014, le constructeur chinois Dongfeng annonce l'injection de 800 millions d'euros dans le capital de PSA Peugeot Citroën, en échange d'une participation de 14 % au capital du groupe.
Bénéfice mutuel
On peut dire que l'essor économique de la Chine crée des conditions favorables au développement sain des relations économiques et commerciales sino-françaises. Le déficit commercial de la France à l'égard de la Chine était abyssal. Mais depuis 2014, la restructuration économique chinoise et la croissance de la demande intérieure ont contribué à rééquilibrer les échanges commerciaux entre la Chine et la France. Les exportations françaises vers la Chine se sont accrues plus rapidement que n'augmentaient les importations, et l'arrivée de touristes et d'étudiants chinois de plus en plus nombreux en France a elle aussi apporté sa contribution à l'économie française. L'augmentation des investissements chinois a fait le reste.
Les investissements chinois en France jouent un rôle positif pour la stabilité et le développement de l'économie française. Premièrement, en contribuant à l'emploi. Cette contribution se matérialise non seulement par le maintien et la création de postes dans les entreprises où les Chinois investissent, mais également par la stabilité et l'augmentation de l'emploi dans le secteur des services comme le droit, la comptabilité, le tourisme, le transport, l'immobilier, etc. Deuxièmement, le capital investi finance aussi, par le biais des services financiers et de l'achat à crédit, d'autres entreprises françaises. Troisièmement, les investissements chinois en France favorisent le développement du commerce, dans les deux sens, entre la Chine et la France. D'une part, l'investissement accroît la présence des équipements et produits techniques chinois, améliorant par conséquent la compétitivité des produits ; d'autre part, des produits français voient ainsi s'ouvrir les portes du marché chinois.
Les entreprises chinoises investissant en France peuvent bénéficier de la politique et de l'environnement français favorables à l'investissement. La France a de nombreux atouts. D'abord, étant l'un des berceaux de la révolution industrielle et technologique, la France s'est dotée d'un système d'éducation et de formation, ainsi que d'une certaine capacité de R&D et d'innovation, qui rassemble de nombreux talents, tant en termes de techniques que de management. Elle est aux premiers rangs dans un certain nombre de classements : la cinquième économie en volume, la première destination touristique, le deuxième centre de gestion du capital, le deuxième plus gros marché d'Europe, la première puissance aéronautique, spatiale et nucléaire, le deuxième pays en termes d'agriculture et d'industries chimiques, le troisième pays pour l'informatique et la médecine. Elle est en outre le pays de la mode. Son environnement juridique standardisé, transparent et stable, typique d'une économie de marché développée, accorde un traitement national aux investisseurs étrangers. Des crédits d'impôts sont proposés aux PME qui créent des emplois, mettent en place des formations pour leur personnel, ou font des efforts en matière de R&D, d'innovation, de protection de l'environnement. Sauf les secteurs de la défense et des jeux de hasard, la création d'entreprise n'est pas soumise à approbation administrative.
Enfin, l'investissement chinois en France peut progressivement élargir sa portée. Les entreprises chinoises peuvent en profiter pour entrer sur les marchés voisins, qu'il s'agisse d'autres pays européens ou de pays africains, mettant à contribution les compétences conjuguées, françaises et chinoises, introduisant des ressources de technologies avancées, de services et de gestion. Ceci contribue à élever le niveau technologique des entreprises chinoises, à améliorer leur image de marque et enfin, à renforcer leurs capacités de gestion transnationale.
Un nouvel essor
De plus en plus nombreuses, les entreprises chinoises en France ont besoin de développer leurs échanges et leur coopération collectifs avec divers milieux français. Ceux-ci espèrent à leur tour bénéficier d'un meilleur canal pour connaître et contacter les entreprises chinoises. C'est de ce besoin qu'est née l'Association des entreprises de Chine en France (AECF).
L'AECF s'est constituée sur l'initiative d'entreprises et organismes chinois en France. Il s'agit d'une association à but non lucratif s'autogérant. Elle vise à favoriser le bon développement des investissements chinois en France et à approfondir la connaissance des entreprises adhérentes sur la France en organisant des activités de communication avec divers milieux. Elle a aussi pour objectifs d'accroître la capacité de gestion transnationale des entreprises chinoises, de créer des occasions commerciales pour celles-ci en France, d'appeler les services français concernés à apporter des solutions aux soucis qu'elles rencontrent en matière de formalités administratives et autres. L'AECF, Business France et la Chambre de commerce et d'industrie de Paris organisent ainsi conjointement un forum sur l'investissement chinois qui se tient chaque année. Les difficultés rencontrées par les entreprises chinoises font le sujet des discussions du forum. Les services français concernés sont invités sur place à communiquer avec ces entreprises chinoises. Le forum est devenu une plate-forme d'échanges importante entre les autorités intéressées françaises et les entreprises chinoises.
Au-delà de leurs problèmes particuliers, les entreprises chinoises en France rencontrent des problèmes communs : les limitations dans le domaine du transfert de hautes technologies, les difficultés d'obtention de visas pour les employés chinois, la lourdeur des formalités d'obtention du permis de séjour, la non-reconnaissance des permis de conduire entre les deux pays, la complexité des formalités d'assurance maladie et vieillesse, les obstacles auxquels se heurtent les personnels dans leurs démarches administratives, etc.
L'initiative « une Ceinture et une Route » lancée par la Chine et la mise à jour industrielle qui en découle offrent d'excellentes opportunités de développement aux relations économiques et commerciales entre la Chine et la France. L'atmosphère de « lune de miel » du cinquantenaire des relations diplomatiques se prolongeant, les visites officielles de haut niveau se poursuivent cette année. Le premier ministre français Manuel Valls a visité la Chine fin janvier, et il a invité son homologue Li Keqiang à se rendre en France au mois de juin. Le gouvernement français accueille des entreprises chinoises en prenant progressivement des mesures d'encouragement. Une des mesures favorables lancées par la France dans le cadre de la célébration du 50e anniversaire fut la simplification des formalités de visa pour les citoyens chinois se rendant en France. D'autres dispositions encore seront adoptées dans ce domaine, comme l'augmentation du nombre des visas et la mise en place de visas multiples entrées d'une durée de cinq ans. Les collectivités locales s'efforcent d'attirer des entreprises chinoises : la région Île-de-France a proposé un projet d'incubateur d'entreprises chinoises, et la région Normandie parle d'un projet d'accélérateur.
2014 a vu se développer l'intérêt des entreprises françaises pour le marché chinois et l'arrivée d'entreprises chinoises plus nombreuses en France. Cette dynamique va se poursuivre. Le développement futur des relations économiques et commerciales entre la Chine et la France suscite beaucoup d'espoirs.
*YAN JUFEN est représentant en France du Conseil chinois pour la promotion du commerce international et secrétaire général de l'AECF.
- Institut des Études sur les Frontières chinoises
- Institut d’Études sur le Japon
- Institut des Études de l'Europe
- Institut des Études sur l'Amérique latine
- Institut des Études sur les États-Unis
- Institut de Linguistique
- Institut d’Économie industrielle
- Institut d’Économie
- Institut du Développement rural
- Académie du Marxisme
- Institut de la Littérature
- Institut de la Philosophie
- Institut de l'Economie et de la Politique mondiales